Jean Prouvé : Cependant ma satisfaction, et celle de certains de mes collaborateurs de l’époque, est que je vous disais tout à l’heure nous n’avons pas perdu notre temps, et ça je ne le crois pas. Parce que nous avons fait une ouverture à l’architecture actuelle. Nous l’avons faite trop tôt. Peut-être qu’elle se serait effectuée sans nous. Plus tard. Je crois qu’il est toujours dangereux d’arriver trop tôt. Parce que quand on arrive trop tôt on bouleverse les esprits, ce qui fait qu’on vous écarte facilement. C’est un peu ce qui m’est arrivé, et ce qui est arrivé à toute mon équipe. Chaque fois que j’ai exposé des constructions comme celles-ci il y a eu un acquiescement instantané des gens qui venaient voir. Ce qui me révèle que, on juge bien là les français, des gens qui sont habitués à leurs vieilles architectures et une chaumière c’est rudement beau quand elle est véritable et qu’il faut leur « refabriquer » industriellement ce qu’ils aiment. On ne peut pas industrialiser une chaumière, c’est stupide. Citroën n’a pas industrialisé le carrosse de Louis XIV. Ils ont sorti quelque chose de nouveau. A nous d’en faire autant pour le bâtiment. Et jugeons un peu mieux nos compatriotes, en pensant que si on leur montre des choses, ils vont peut-être accourir. Mais il ne faut pas leur raconter, il faut leur montrer. Je crois qu’un avantage de ce qu’on faisait à Maxéville c‘est qu’on montrait ce qu’on faisait.