Chaise Cafétéria n° 300, 1950
Au cours de l’année 1950, le bureau d’études des Ateliers Jean Prouvé travaille à une nouvelle version de chaise « semi-
métallique » (piètement métal, siège bois), qui combine le principe de la chaise n° 4 à piètement métal d’avant-guerre avec les modes de fixation des modèles en bois. Le bâti se compose de deux piètements arrière en tôle pliée « d’égale résistance » dans lesquels sont soudés les tubes cintrés des pieds avant, réunis par des entretoises. La mise au point d’une version démontable de cette chaise semi-métallique est accélérée afin de répondre à un appel d’offres pour le mobilier d’un restaurant universitaire (cafétéria des Arts et Métiers, Cité internationale universitaire, Paris). Comme pour son homologue en bois, la CB 22, ce modèle proposé à l’exportation dès juin 1950 affirme clairement son caractère démontable. Il est composé de deux flancs métalliques réunis à l’avant par une entretoise en tube placée sous l’assise, et à l’arrière par un tirant fixé visiblement à l’extérieur du piètement par des écrous et rondelles sur un rond embouti. Ce tirant est protégé par un profil d’entretoise en acier sur lequel sont soudés les crochets de fixation de l’assise. Les montants arrière sont échancrés pour recevoir le dossier. Des variantes portent sur les détails de fixation ou le cintrage des tubes, dont certains (essentiellement sur la version export) présentent des plis plus ou moins serrés. Les prestations sont les mêmes que pour la version fixe : les parties métalliques sont émaillées ou laquées au four, l’assise et le dossier en contreplaqué de chêne moulé sont vernis, les pieds sont protégés par des embouts de caoutchouc. Livré à plat, accompagné d’une notice détaillée de montage, ce modèle est tout particulièrement destiné à l’exportation (il est alors dénommé Tropique). Des variantes sont étudiées pour remplacer les parties bois par une matière plus adaptée aux climats
chauds : en 1951 est produit un prototype équipé de sangles, ainsi qu’une version toilée de la chaise tendue de cuir présentée pour l’aménagement du siège d’Air France Congo, à Brazzaville (qui sera finalement meublé avec le modèle démontable n° 300). Ce marché important, ainsi que celui de la cafétéria des Arts et Métiers, justifie le nombre élevé d’exemplaires fabriqués (550) en 19511. Outre le marché universitaire et l’export, ce modèle est proposé pour un usage domestique (il équipe la maison Coque présentée par les Ateliers Jean Prouvé au Salon des arts ménagers, début 1951), mais il sera rapidement abandonné au profit du modèle Métropole n° 305 non démontable, plus économique. En 1953, dans le cadre des essais d’utilisation de l’aluminium pour le mobilier2, une variante de la chaise n° 300 est envisagée, mettant en œuvre un piètement coulé, dont le système d’assemblage est étudié très précisément par Jean Prouvé. C’est d’ailleurs ce modèle qu’il reprendra à la fin des années 1970 pour un projet d’édition avec Formes nouvelles3.
1. « Liste des séries de meubles standard fabriqués en 1951 », Ateliers Jean Prouvé.
2. Sous la pression de l’Aluminium français mais aussi par intérêt pour les performances de ce matériau, Jean Prouvé étudie à partir de 1950 la possibilité d’une large application de l’aluminium aux modèles de meubles existants, comme des adaptations combinant des piètements coulés et des éléments en tôle d’aluminium. En 1953, ces essais se multiplient et débouchent sur la fabrication de prototypes et de petites séries, mais le coût de ces variantes entièrement en aluminium ne permet pas d’envisager un débouché suffisant, notamment pour le mobilier scolaire.
3. À la fin des années 1970, Jean Prouvé reprend certaines de ces études, à la demande de M. Hazan, de Formes nouvelles. Des essais sont menés avec le fondeur Jean Cini, ancien collaborateur de Jean Prouvé, mais ce projet n’aboutira pas. Prouvé en évoque les difficultés dans Jean Prouvé par lui-même, p. 38-39.